INTERVIEW DU MOIS : VALÉRIE PAPARELLE, VICE-PRÉSIDENTE SANTÉ MENTALE FRANCE, DIRECTRICE LA NOUVELLE FORGE
Retour aux actualitésRencontre avec Valérie Paparelle, Vice-Présidente de Santé mentale France, qui défend avec conviction la cause du rétablissement et de l’inclusion. Engagée depuis plus de 20 ans dans le secteur de la santé mentale, elle met en avant le rôle essentiel de la Fédération, qui réunit les acteurs essentiels au rétablissement et à l’inclusion des personnes concernées.
“Il ne faut rien lâcher. Nous entrons dans une période difficile et incertaine, où le renoncement est un risque réel. Pourtant, nous avons beaucoup à accomplir ensemble pour améliorer les choses. “

1. Pouvez-vous vous présenter et nous parler de votre parcours ?
Je suis diplômée en psychologie du travail. Mon parcours a débuté dans le recrutement, avant de m’orienter vers le bilan de compétences, notamment auprès des personnes en situation de handicap. Après plus de 20 ans au sein d’une association nationale dédiée à l’insertion des personnes handicapées, où j’ai occupé divers postes de direction et participé à des projets de développement et d’innovation, je suis depuis 10 ans Directrice générale de La Nouvelle Forge, une association de santé mentale. Cette structure se distingue par ses activités à la fois dans les soins psychiatriques pour enfants et adolescents, ainsi que dans l’accompagnement des adultes en situation de handicap ou de grande précarité. Mon engagement au sein de La Nouvelle Forge repose sur une transformation inclusive, visant à créer des services adaptés aux besoins locaux et favorisant la coopération des acteurs du territoire. Les valeurs de rétablissement, autodétermination, respect des droits et empowerment sont au cœur de notre mission, avec un engagement fort contre les discriminations et pour l’inclusion et l’épanouissement des personnes que nous accompagnons.
2. Vous avez récemment été nommée Vice-Présidente de Santé mentale France. Qu’est-ce qui, selon vous, fait la force de cette fédération ?
Être Vice-Présidente de la Fédération est pour moi bien plus qu’un titre honorifique. Je crois profondément en son rôle, qui permet de rassembler les acteurs essentiels au rétablissement et à l’inclusion des personnes concernées. La Fédération a su se transformer grâce à la fusion entre la Croix-Marine et AGAPSY puis avec le Congrès Réh@b’ (ex CFRP). Cette évolution a permis d’intégrer la parole des personnes concernées et de leurs proches dans la gouvernance et nos projets, créant ainsi un collectif puissant.
Notre modèle collaboratif, qui privilégie les synergies plutôt que les oppositions, est au cœur de notre plaidoyer. Nous militons pour une politique de santé mentale qui mette l’accent sur la qualité des soins et de l’accompagnement et les moyens que les pouvoirs publics doivent consacrer à cette cause. Dans cette dynamique, nous avons cette année créé Plein Espoir, un média dédié au rétablissement qui promeut des forces comme la pair-aidance et permet aux personnes de découvrir des trajectoires de rétablissement possibles. Ce projet illustre notre engagement à accompagner les individus dans leur parcours de rétablissement, et à les aider à retrouver un équilibre personnel malgré les défis liés à la maladie, l’isolement ou l’exclusion.
Enfin, l’une des grandes réussites de la Fédération a été d’obtenir cette année la reconnaissance de la santé mentale comme grande cause nationale. Dans un contexte d’actualités mortifères, il est plus que jamais crucial de continuer à en parler et de maintenir cette cause au cœur des priorités des pouvoirs publics.
3. Quelles sont les principales valeurs et projets que défend la Fédération Santé mentale France ?
Ses principales valeurs reposent sur le rétablissement. Nous croyons que chaque personne, malgré les troubles qu’elle vit, peut trouver une voie d’autodétermination et revenir à une vie choisie. Il s’agit de soutenir l’individu dans son parcours, en mettant en avant ses capacités pour qu’il puisse mener une vie qui lui correspond, selon ses propres choix. Cela repose sur la citoyenneté, où chaque personne fait partie de la société sans être exclue. Il est essentiel qu’elle puisse s’inclure dans des espaces de socialisation qu’elle choisit, tout en bénéficiant du soutien des pairs et des professionnels. Cela inclut aussi la possibilité d’avoir un logement, un travail rémunéré ou un rôle social, comme des activités bénévoles, permettant à chacun de faire partie du collectif. La Fédération soutient des groupements d’entraide mutuelle, qui jouent un rôle clé pour aider les personnes à sortir de l’isolement et à se reconnecter à la société.
L’égalité est aussi une dimension clé. L’objectif est de soutenir chaque personne dans son projet de vie, d’assurer un accès égal aux droits et de changer le regard de la société, au-delà des stéréotypes et de la stigmatisation, qu’elle vienne des autres ou de soi-même.
4. Pouvez-vous nous en dire plus sur les initiatives concrètes de la Fédération ?
Santé mentale France œuvre pour sensibiliser et former les professionnels et citoyens à la santé mentale. Nous organisons des événements comme les Journées Nationales, le Congrès Réh@b’ et des ateliers de rétablissement, visant à améliorer la représentation des troubles psychiques. La prévention est essentielle, avec des formations aux Premiers Secours en Santé Mentale (PSSM) et des actions de sensibilisation. Par exemple, l’ouverture de la Maison des Adolescents et notre partenariat avec « Pouvoir d’agir 60 » nous ont permis d’organiser des interventions dans les lycées, afin d’encourager les jeunes à prendre soin de leur santé mentale et de réduire la stigmatisation.
Nos initiatives couvrent toute la trajectoire, de la prévention au soutien du rétablissement. Nous participons aux projets territoriaux de santé mentale, rendant l’aide plus accessible. Au niveau national, nous collaborons avec des institutions comme la Haute Autorité de Santé et le Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées pour porter la voix des personnes concernées. Par des actions comme la PCH Handicap psychique, les PSSM et notre plaidoyer, nous soutenons la pleine citoyenneté des personnes en situation de handicap psychique, à la fois au niveau national et local. Notre objectif est de faire entendre la voix des personnes concernées de la manière la plus large possible.
5. En tant que nouvelle vice-présidente de Santé mentale France, quel message souhaitez-vous adresser aux adhérents et à ceux qui soutiennent la Fédération dans son action ?
Je ressens le besoin de dire qu’il ne faut rien lâcher. Nous entrons dans une période difficile et incertaine, où le renoncement est un risque réel. Pourtant, nous avons beaucoup à accomplir ensemble pour améliorer les choses. Il est donc essentiel que toutes les parties prenantes restent engagées sur cette voie : agir en matière de prévention, travailler directement avec les personnes concernées et collaborer pour améliorer le système global, sans céder au repli.